Dec'rasage & Analyses

La glorieuse certitude du carnet de chèques
La glorieuse certitude du carnet de chèques

Le foot français est fait de ces descentes aux enfers de clubs prestigieux avant un hypothétique retour en grâce. Il n’y a qu’à voir tous les articles qui sentaient la naphtaline quand le Red Star a défié l’OM en 32e de finale de la Coupe de France. Aujourd’hui, la Ligue 2 a presque plus de gueule que la Ligue 1 quant aux participants : Nantes, Monaco, Metz, Lens, Reims... Autant d’équipes qui ont connu un pic de forme, comme un joueur, avant de retomber dans un anonymat relatif. Une trajectoire “normale” pour un club de foot? En France, oui. Avant que, peut-être, de riches mécènes corrigent cette terrifiante incertitude du sport.

En France, la glorieuse incertitude du sport...

Le exemples de clubs appelés à régner sur la France actuellement dans les profondeurs du foot national sont nombreux. C’est à peine exagéré de dire que le RC Strasbourg a connu une lente descente aux enfers depuis son titre de 1979, avec quelques soubresauts (une Coupe de France, deux Coupes de la Ligue). Aujourd’hui en CFA2 à cause de problèmes financiers, l’équipe est clairement en-dessous de son niveau moyen (dans le dernier tiers de la L1). Vu la taille de l’agglomération, il paraît douteux que d’ici quelques années, le RCS végète toujours au cinquième échelon national.

Le raisonnement vaut aussi pour des clubs qui historiquement ont toujours été moyens, hormis un âge d’or. Lens a longtemps oscillé entre Ligue 2 et bas de tableau de L1 avant son âge d’or 1995-2005. Est-ce si infamant de voir le club en L2? Pour les supporters qui ont été biberonnés aux 5e places du Racing dans les années 90, sans doute, les autres ont peut-être un peu plus de recul. On pourrait développer les exemples à l’infini avec Sedan, qui a eu une période dorée dans les années 50, puis une autre, plus courte, dans les années 90-2000. Auxerre, avec pour acmé le titre de 1996, qui suit une trajectoire un peu comparable à celle de Lens, sur une amplitude plus longue. Quant à Nantes, on veut croire qu’il nous fait une “Saint-Etienne” avec 10 ans de purgatoire avant de se réinstaller dans l’élite.

Au contraire, en Premier League, on n’a pas l’impression qu’il y a un magma regroupant les clubs de D1 et de D2, avec positions interchangeables. La plupart des clubs de Premier League y sont depuis toujours, ou presque. 14 des 20 clubs actuellement dans l’élite compte plus de 70 saisons à ce niveau. A titre de comparaison, une petite moitié de la L1 française compte plus de 30 saisons dans l’élite.


En Angleterre, la glorieuse certitude du carnet de chèques

Aujourd’hui il est possible dans beaucoup de championnats de déterminer via les budgets et/ou la masse salariale à quelle place vont finir les clubs, accident industriel excepté.

 



 

Un titre s’achète-t-il? Dans son livre Pay as you play, Paul Tomkins démontre qu’aujourd’hui, un point en Premier League pour les équipes jouant le titre coûte environ 2 millions de livres. Faites le total pour obtenir les 85-90 points nécessaires pour être champion. Un riche investisseur qui voudrait faire d’une équipe moyenne une écurie capable de gagner le championnat doit désormais s’aligner sur Manchester City ou United, Arsenal et Liverpool boxant déjà dans une catégorie bien inférieure. La bonne surprise que constitue le début de saison de Newcastle est la seule exception notable aux prévisions basées sur la richesse des clubs.

Pay as you play permet de revenir sur un certain nombre d’idées reçues. Ainsi, l’équipe d’Arsenal des Invincibles d’Arsène Wenger n’était pas, comme on l’a beaucoup entendu, une équipe faite de bonnes affaires dégottées sur le marché de l’occasion à bas prix, mais le plus gros budget de Premier League. Le titre de Blackburn en Premier League, en 1995, repose quasi-exclusivement sur un recrutement XXL avec un budget en conséquence. Une fois le riche mécène parti, le club a retrouvé son niveau originel, c’est à dire entre la Premier League et la League One.


La France à la croisée des chemins

En France, ça n’est pas encore le cas, système redistributif et statut de vivier des très gros championnats oblige. En France, il est possible de monter une équipe pour gagner le titre en 5 ans en mêlant des grognards revanchards et des jeunes pousses. Le titre de Lille l’an dernier, et même le sacre de l’OM il y a deux ans en sont la plus parfaite illustration. L’arrivée des Qataris change la donne : quand Lille sera pillé de ses meilleurs éléments et devra entamer un nouveau cycle, donc un retour aux dures réalités du ventre mou, le PSG pourra se maintenir au sommet en rachetant de bons joueurs. L’argent ne fait pas gagner des titres, mais permet de se maintenir au plus haut niveau sur la durée. Et ce n’est pas un hasard si QSI investit dans le championnat de France, où la marche financière pour gagner des titres est beaucoup moins haute qu’en Angleterre ou en Espagne, et dans une moindre mesure en Italie.

Comme l’écrivait le professeur de marketing Michel Desbordes, dans le livre blanc des Etats généraux du foot, publié par l’Equipe il y a un an : “sans régulation, le système sombrera car ce seront toujours les mêmes équipes (les plus riches) qui gagneront la Ligue des Champions, et le public se lassera. Les Chelsea ou les Manchester City, qui alimentent le marché des joueurs avec toujours plus d'argent, sont des fossoyeurs qui créent des surenchères destructrices. (...) Grâce au fair-play financier, le football redeviendra ce qu'il n'a jamais cessé d'être: un jeu merveilleux, joué par des gens respectés et respectueux, qui font rêver des millions d'enfants, le tout dans un système égalitaire en Europe où Bastia ou Malmö peuvent arriver en finale d'une compétition." Malheureusement, le modèle anglais semble s’imposer petit à petit dans les grands championnats et les plus gros clubs font preuve d’une imagination fertile pour contourner le fair play financier. Le prochain Bastia-Malmö en finale de la Ligue Europe n’est pas pour demain.


2 commentaires

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2 commentaires

  1. Cedric

    19 Janvier 2012

    Bachibouzouks!

     
  2. Marco

    10 Février 2012

    Sujet d'actualité s'il en est ! Malgré tout, je doute sur la pertinence de la fin de l'article, que je trouve manichéenne. C'est trop facile. Moi, le PSG d'aujourd'hui me fait plus rêver que celui d'hier, car le niveau de jeu est bien meilleur, et de ce fait je prend du plaisir à le voir jouer. Au contraire ce qui ne me fait pas rêver, c'est les simulations des joueurs, les mauvaises ambiances et les insultes dans les stades, les équipes qui jouent a 11 derrières. Bref, ce genre de chose n'a rien à voir avec le fait play financier. Rapprocher les deux choses est assez douteux de mon point de vue.

     
 

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  • Capitaine Haddock
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  • Le ballon rond, ça regorge de sapajou, de moules à gaufres voire d'anacoluthes. Raison de plus pour s'y intéresser.


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